Christian Viguié, Président-directeur général de Delta Drone, confie ses perspectives d’expansion autour des drones et robots de surveillance et d’inventaires retenus par les professionnels dans leurs environnements portuaires, entrepôts et sites sensibles – tribunaux ou centres de recherches.
Quelles fonctionnalités de rupture proposez-vous dans vos solutions professionnelles ?
Notre solution ISS Spotter incorpore une station d’accueil intelligente. C’est en quelque sorte l’aéroport du drone professionnel, sa base d’envol et d’atterrissage ; elle permet de recharger ses batteries, de programmer des vols de surveillance de sites, d’automatiser les connexions et la transmission de données acquises en vol. Nous cherchons à accélérer la mise place de systèmes technologiques aux côtés de moyens humains dans le monde de la sécurité ; un secteur très régulé où nous remportons d’importants contrats actuellement. Deux exemples début 2021 : le ministère de la Justice français nous a mandatés pour sécuriser ses tribunaux et le CEA pour protéger un de ses sites de recherche à Grenoble.
Le drone et le robot coopèrent parfois. Dans quel but et avec quelle conséquence sur l’emploi ?
Dans nos solutions d’inventaires, un robot terrestre autonome peut être associé à un drone. Nous travaillons en partenariat avec la société française Effidence qui a conçu un robot anticollision.
Pour le contrôle de stocks en entrepôt et l’inventaire automatisé, le déploiement de notre solution Countbot, est en pleine accélération aussi ; il s’agit d’une conception menée avec Geodis. Nous devenons un intégrateur ou un ensemblier comme Airbus ou Dassault qui ne fabriquent pas tout eux-mêmes. En termes d’usages, les drones et les robots apportent des technologies complémentaires qui vont améliorer la sécurité des hommes ou apporter une assistance aux activités professionnelles. Plutôt que de tuer l’emploi, ils le modifient en profondeur.
Pourquoi Delta Drone a-t-elle investi dans la startup Diodon Drone Technology ?
Cette décision est le fruit d’une rencontre et de circonstances locales, ce n’est pas un acte prémédité de longue date. Elle provient de notre volonté de favoriser, au-delà du cœur de métier de Delta Drone, l’émergence d’un écosystème toulousain réunissant des sociétés complémentaires et à fort potentiel. Nos drones sont accompagnés d’applications métiers et de services. Lorsqu’un chef d’entreprise adhère à cette stratégie, nous proposons une prise de participation minoritaire pour accompagner son entreprise, sans nous immiscer dans sa gestion. Delta Drone va détenir une participation minoritaire de plus de 10% du capital de Diodon. Mais l’aspect financier n’est pas le principal.
Quelles opportunités de marché envisagez-vous ?
Notre intérêt provient des demandes de clients qui guident notre réflexion. Par exemple, nous sommes en discussions avancées avec les infrastructures portuaires d’un grand port d’Afrique. Dans cet environnement gigantesque, les drones doivent être robustes, résistants à la salinité de l’air et tolérer toute chute dans l’eau de mer. Nous voulons répondre efficacement à ces problématiques en proposant une version marine de nos drones. La technologie de Diodon contribue à développer un drone, doté d’un système amphibien, capable d’amerrir. Diodon continuera à suivre son propre parcours dans les applications marines.
La concurrence asiatique freine-t-elle votre expansion ?
Le prix d’un drone professionnel oscille entre quelques milliers d’euros et quelques dizaines de milliers d’euros. Les fabricants chinois abaissent systématiquement les prix, créant un brouillard dans lequel les clients se demandent pourquoi payer plus cher. Pour sortir de cette impasse, nous devons verticaliser notre offre, l’adapter à des usages métiers précis. Nos clients y attachent beaucoup d’importance. Cela nous mène à intégrer, dans une solution unifiée, de nombreux programmes informatiques, composants électroniques et mécaniques. Nous voulons offrir des services professionnels autour de drones focalisés sur les activités métiers. Grâce à un ensemble de logiciels et à l’introduction de l’IA dans nos cartes électroniques, nous proposons des solutions intégrées dont le prix moyen tourne autour de 150 000 euros. Nous ne jouons plus dans la même cour.
Quelles sont vos perspectives financières, notamment en termes de rentabilité ?
Nous sommes une société cotée qui investit constamment pour mener des recherches complexes à amalgamer sur un seul compte de résultat. Nous intégrons des compétences d’origine diverses et, après avoir enchaîné les plans à deux ans, nous ne sommes pas encore bénéficiaires. Nous réalisons un chiffre d’affaires de 14 millions d’euros, stable par rapport à 2019, en dépit de la crise sanitaire qui a affecté nos livraisons et notre facturation. Mais nous devrions être rentables dès la fin 2021.